Des équipes de sauveteurs cherchaient des survivants, dimanche 15 août, en Haïti, au lendemain d’un séisme de magnitude 7,2, qui a fait au moins 304 morts et plus de 1 800 blessés, dans le sud-ouest de l’île. Un événement qui a ravivé les terribles souvenirs du grand tremblement de terre de 2010. Le séisme s’est produit samedi à 8 h 29, heure locale (14 h 29, à Paris), selon les données de l’Institut américain de géophysique (USGS).
De nombreux bâtiments se sont effondrés lors de la puissante secousse qui a piégé des centaines d’Haïtiens sous des dalles de béton. Les habitants se sont mobilisés pour secourir les victimes blessées. « Les premières interventions, menées tant par les sauveteurs professionnels que par des membres de la population ont permis d’extraire de nombreuses personnes des décombres », ont insisté les services de la protection civile.
Le bilan reste difficile à établir après la catastrophe. Selon la protection civile haïtienne, au moins 304 personnes sont mortes. « Nous avons enregistré 160 décès dans le Sud, 42 dans les Nippes, 100 dans la Grand Anse et deux dans le Nord-Ouest », a annoncé le directeur de la protection civile, Jerry Chandler, en donnant le détail du bilan par département lors d’un point de presse samedi soir.
Plus de 1 800 personnes ont également été blessées dans la catastrophe et les rares hôpitaux existant dans les régions affectées peinent déjà à fournir les soins d’urgence. Samedi après-midi, M. Chandler affirmait à l’Agence France-Presse (AFP) qu’au moins trois centres hospitaliers, dans les communes de Pestel, Corailles et Roseaux, étaient saturés.
Des policiers mobilisés
Le chef du gouvernement, Ariel Henry, qui a survolé en hélicoptère les zones les plus affectées, samedi, a annoncé que l’état d’urgence avait été déclaré pour un mois dans les quatre départements affectés par la catastrophe.
Du personnel et des médicaments ont déjà été acheminés par le ministère de la santé vers la péninsule sud-ouest, mais la logistique d’urgence est mise en péril par l’insécurité structurelle qui mine Haïti depuis des mois.
Sur un peu plus de deux kilomètres, l’unique route reliant la capitale à la moitié sud du pays traverse le quartier pauvre de Martissant, totalement sous contrôle des gangs armés depuis le début de juin, empêchant la libre circulation. « Nous savons tous que nous avons un problème sur Martissant. Nous avons décidé que cette voie serait perméable, c’est-à-dire qu’il faut que toute l’aide puisse passer », a déclaré M. Henry lors d’un point de presse samedi soir.
« La police ainsi que les FAD’H [Forces armées d’Haïti] sont mobilisées et d’autres moyens sont mobilisés afin que cette aide que nous voulons acheminer à nos frères et sœurs en difficulté puisse arriver », a ajouté le chef du gouvernement sans fournir davantage d’explications.
Le tremblement de terre s’est produit à 12 km de la ville de Saint-Louis-du-Sud, à 160 km au sud-ouest de la capitale, Port-au-Prince, mais la longue secousse a été ressentie dans l’ensemble du pays. Sur la côte sud, un hôtel de plusieurs étages, baptisé Le Manguier, s’est totalement effondré aux Cayes, troisième ville d’Haïti. Le corps sans vie de l’ancien sénateur haïtien Gabriel Fortuné, propriétaire de l’hôtel, a été retiré des décombres, selon des témoins. Sa mort a été confirmée par le premier ministre.
Comptant plus de 200 000 habitants, l’agglomération de Jérémie a également souffert d’importants dommages dans le centre-ville, constitué principalement d’anciennes maisons de plain-pied. « Le toit de la cathédrale est tombé », a détaillé Job Joseph, un habitant. « La grande rue est bloquée (…). C’est là qu’il y a toute l’activité économique de la ville. » « Les gens sont affolés, les parents sont avec leurs enfants dans les bras et quittent la ville, car il y a des rumeurs de tsunami », a abondé Tamas Jean-Pierre, un autre habitant.
Le soutien international s’organise
Les Etats-Unis ont, de leur côté, offert leur assistance « immédiate », le président, Joe Biden, chargeant la directrice de l’Agence américaine d’aide internationale (USAID), Samantha Powers, de coordonner cet effort. M. Biden a fait part de sa « tristesse » face à la catastrophe.
De son côté le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a assuré « suivre les dernier développements de la tragédie en Haïti ». « Les Nations unies travaillent pour répondre aux besoins d’urgence », a-t-il tweeté.
La République dominicaine, voisine d’Haïti – sur la même île –, a annoncé l’envoi de 10 000 rations d’urgence et des équipements médicaux. Le Mexique, le Pérou, l’Argentine, le Chili et le Venezuela ont également proposé leur aide, tout comme l’Equateur, qui dépêche une équipe de 34 sapeurs-pompiers pour participer aux recherches. Le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a assuré aux Haïtiens qu’ils pouvaient « compter sur l’aide de l’Espagne ».
Les 253 médecins cubains présents dans le pays pour coopérer dans la lutte contre la pandémie de Covid-19 adaptaient un hôpital de Port-au-Prince pour recevoir des blessés. La joueuse de tennis japonaise, Naomi Osaka, dont le père est haïtien, va offrir la totalité des gains qu’elle percevra lors d’un prochain tournoi aux victimes du séisme. « Cette dévastation fait vraiment du mal », a-t-elle écrit sur Twitter.
Le pays le plus pauvre des Amériques garde encore en mémoire le séisme du 12 janvier 2010, qui avait ravagé la capitale et plusieurs villes de province. Plus de 200 000 personnes avaient été tuées, et plus de 300 000 autres avaient été blessées lors de la catastrophe. Plus d’un million et demi d’Haïtiens s’étaient ensuite retrouvés sans logis, plaçant les autorités et la communauté humanitaire internationale devant le défi colossal d’une reconstruction dans un pays sans cadastre ni règles de bâti.
Sans parvenir à relever ce défi de reconstruction, Haïti, qui est aussi frappé régulièrement par des ouragans, a en dix ans plongé dans une crise sociopolitique aiguë.